Les victimes d’attouchements sont souvent seules avec elles-mêmes, au fond d’elles-mêmes. Pourquoi ? Car bien souvent, elles n’arrivent pas à mettre des mots sur les gestes qu’on leur a fait sur le corps ou dans leur corps. Et ce n’est qu’en grandissant qu’elles comprennent qu’il y avait dans tel ou tel geste quelque chose de pas normal, quelque chose qui n’était pas anodin.
Bien souvent aussi, les victimes d’attouchements utilise le mot attouchement pour ne pas dire viol ou agression sexuelle. Car ces autres mots là font peur et ont une connotation juridique tellement forte que la simple idée de considérer l’attouchement que l’on a subi comme un viol, nous ferait perdre un peu plus la tête.
Elles se retrouvent donc face à elles-même, jusqu’à ce qu’une brêche s’ouvre, que la parole se délie autour d’elles, que quelqu’un ose parler de son histoire personnelle et qu’elles se rendent compte qu’elles ne sont pas les seules, pas toute seule.
Elles se retrouvent aussi comme les victimes d’inceste souvent dans le désarroi face aux offres de soins psychologiques et psychothérapeutiques qui leur sont proposées.
Elles ne savent pas si elles peuvent s’adresser à un CMP ou une psychologue en libéral. Elles ont souvent peur d’être jugées, qu’on leur dise que c’est de leur faute ou pire qu’on nie leur souffrance.
J’ai parfois entendu des histoires terribles sur lesquelles des professionnels ont posé les mots “vous viviez simplement une histoire d’amour avec votre frère”.
Il est temps de prendre conscience que les victimes de violences sexuelles et d’attouchements ont le droit d’avoir des soins adaptés qui prennent en compte toute la réalité des traumatismes qu’elles ont subi. Qu’on les considère dans leur parole. Qu’on ose écouter attentivement, questionner et demander “et aujourd’hui, comment vous vous sentez dans votre corps ? dans votre coeur ? vous y pensez souvent ? combien de fois par mois ? par semaine ?” Afin que ces victimes ne soient pas toute seule avec leur vécu, que quelqu’un n’ait pas peur d’aller regarder tout cela avec elle.
Lorsque j’ai créé la formation Accompagner les blessures de l’intime, Devenir thérapeute psycho-corporelle spécialisée dans la prise en charge des victimes de violences sexuelles et autres psycho-traumatismes, ma volonté était avant tout de former des professionnels à la prise en charge des victimes d’inceste.
Souvent, on retrouve le mot d’attouchement dans ces contextes, presqu’un peu comme pour minimiser les faits, comme pour adoucir. Avoir été attouché pourrait sembler faire moins mal que d’avoir été violé. En réalité, il n’en est rien.
Pourquoi ? Dans la plupart des situations que j’ai accompagné et que je continue d’accompagner, dans les décisions de justice que je lis, le mot ressort mais il couvre en réalité un ensemble de violences sexuelles avec acte de pénétration ou non que les personnes ont vécu.
Vivre des attouchements ce peut être vivre de l’inceste, des abus sexuels, subir de la pornographie imposée, subir des gestes sexualisés, des soins d’hygiène trop prononcés, trop répétés, des agressions sexuelles multiples et aussi des viols.
Face à ce mot, le droit range et catégorise en “atteinte sexuelle”, “agression sexuelle”, “viol”.
Et, la victime d’attouchement garde une empreinte dans son corps de ce geste inadapté, interdit.
Lorsque j’accompagne des victimes d’attouchements ou d’inceste, je prends en compte toutes les dimensions de ces violences sexuelles particulières : le système éducatif de la victime, le niveau social de sa famille, les violences transgénérationnelles, les scénarios traumatiques vécus par la victime, les alliées et complices, les démarches judiciaires entreprises, le niveau de protection de la victime, ses ressources physiologiques, physiques, psychiques, corporelles et émotionnelles, sa sexualité traumatique, ses réactivations traumatiques, notamment.
La Méthode Coeur Pivoine – Corps Précieux que j’ai créée et que je transmets aux thérapeutes qui veulent se former a pour but d’aider dans sa globalité les victimes de violences sexuelles et pas seulement sur un pan de leur réalité. Nous travaillons la reconnexion au corps, l’estime de soi, la confiance en soi, la puissance d’être et le sens de cette expérience terrible que la personne a vécu, et cela dans le respect de la loi, notamment de la loi pénale française.
Il est temps qu’un plus grand nombre de thérapeutes soient formés, des thérapeutes qui osent demander : “quand vous me dites “attouchements” est ce que vous pouvez me montrer le geste pour bien que je comprenne ?” et qui solidarisent la victime à eux pour ne plus jamais qu’elles soient seules dans leur tête avec tout ce vécu, qu’elles sachent qu’on peut en sortir, qu’elles avancent avec conscience vers leur corps et renouent avec leur amour d’elle-même, en vrai, et dans toutes les parties de leur corps.
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